Contrats entre fournisseurs et distributeurs : l’encadrement des pénalités logistiques devant le Conseil constitutionnel

13.02.2024

Gestion d'entreprise

Le Conseil d’État a un doute sur la conformité de l’article L. 441-17 du code de commerce.

La loi EGAlim 2 encadre, depuis le 20 octobre 2021, les modalités de fixation de pénalités logistiques qu'un distributeur peut infliger à son fournisseur en cas d'inexécution d'engagements contractuels. La violation de ce dispositif engage la responsabilité de l'auteur du manquement et l'expose en outre à une amende civile (C. com., art. L. 441-17).

Remarque : cet encadrement a été renforcé depuis le 1er avril 2023 par la loi EGAlim 3 (C. com., art. L. 441-17 et L. 442-1, 3°, mod. par L. n° 2023-221, 30 mars 2023, art. 12 et 13 ; C. com., art. L. 442-4).

L’exigence de prévoir « une marge d'erreur suffisante au regard du volume de livraisons prévues par le contrat » pour l’infliction des pénalités pourrait être remise en cause. En effet, le Conseil d’État a estimé que l’absence de définition de cette marge d'erreur suffisante par le législateur est susceptible de porter atteinte au principe constitutionnel de légalité des délits dès lors qu’une amende civile est encourue. Il a donc saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de la procédure de QPC et sursis à statuer en attendant sa réponse.

Remarque : le Conseil d’État avait lui-même été saisi par le groupement d'achat E. Leclerc sous le coup d’une injonction, sous astreinte, de modifier les clauses des contrats passés avec ses fournisseurs relatives aux pénalités logistiques.

La DGCCRF indique, dans un document de 2023, les modalités selon lesquelles la marge d'erreur suffisante au regard du volume de livraisons prévues par le contrat doit être fixée (DGCCRF, Lignes directrices en matière de pénalités logistiques, sept. 2023). Celle-ci doit être déterminée, au cas par cas, au regard des caractéristiques des produits concernés, des modalités d'approvisionnement, des caractéristiques de l'entreprise qui fournit le distributeur et des volumes de livraison prévus au contrat ou, à défaut de volumes de livraison prévus au contrat, au regard des volumes effectivement livrés. Les éventuels retards du distributeur dans le cadre des déchargements des livraisons doivent également être pris en compte.

Ces recommendations qui n'ont pas valeur réglementaire, et encore moins législative, pourraient être officiellement reprises si le Conseil constitutionnel venait à estimer que l'article L. 441-17 pose un problème de constitutionnalité dans sa rédaction actuelle. 

Anne DEBAILLEUL

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